La règle de Saint Benoît
La vie dans le monastère

21. LES DOYENS DU MONASTÈRE

1 Si la communauté est nombreuse, on choisira parmi les moines des frères que les autres reconnaissent comme bons et qui vivent selon Dieu.
2 On en fera des doyens. Pour toutes choses, ils prendront soin de leur groupe de dix frères, en obéissant aux commandements de Dieu et aux ordres de leur abbé.
3 On choisira comme doyens des frères sur lesquels l'abbé peut compter pour partager avec eux le poids de sa charge. 4
On ne les choisira pas selon la date de leur entrée au monastère, mais selon le mérite de leur vie et la sagesse de leur enseignement. 5 Si, par hasard, l'un de ces doyens se gonfle d'orgueil et mérite des reproches, on l'avertira une fois, deux fois, trois fois. S'il ne veut pas se corriger, on lui enlèvera la responsabilité qu'il a,
6 et on mettra à sa place un frère qui a les qualités nécessaires.
7 Pour le second du monastère, nous décidons la même chose.

22. COMMENT DORMENT LES MOINES

UN LIT POUR CHACUN, UN DORTOIR POUR TOUS
1 Chacun a un lit pour dormir.
2
On donne aux frères ce qu'il faut pour la nuit, selon leur genre de vie et comme l'abbé l'a décidé.
3
Autant que possible, tous dorment dans un même lieu. Quand ils sont trop nombreux, ils dorment par groupes de 10 ou 20, avec les anciens qui prennent soin d'eux.
4
Dans ce dortoir, une lampe brûle toute la nuit jusqu'au matin.
5
Les frères dorment habillés, avec une ceinture ou une corde autour des reins. Quand ils sont couchés, ils n'auront pas de couteau à leur côté, pour ne pas se blesser en dormant.

AU SIGNAL, TOUS SE LÈVENT SANS RETARD
6 Ainsi, les moines sont toujours prêts (Luc 12, 35-40), et quand on donne le signal, ils se lèvent sans retard. Et chacun se dépêche pour arriver le premier au Service de Dieu, mais tout de même avec sérieux et avec calme.
7 Les jeunes frères n'ont pas leur lit les uns près des autres, mais ils dorment au milieu des anciens.
8
Quand les moines se lèvent pour le Service de Dieu, ils s'encouragent doucement les uns les autres et ainsi ils enlèvent toute excuse aux dormeurs.

23. MISE A L'ÉCART DE LA COMMUNAUTÉ A CAUSE DES FAUTES

1
Un frère résiste ou il refuse d'obéir, il est orgueilleux ou il murmure, il fait quelque chose contre la sainte Règle ou contre les ordres de ses anciens, et il leur montre du mépris.
2
Dans ce cas, ses anciens doivent l'avertir en particulier une fois, puis deux fois, comme notre Seigneur le demande (Mt 18, 15).
3
S'il ne change pas, on lui fait des remarques en public, devant tous les frères.
4
Quand, malgré cela, il ne se corrige pas, on le met à l'écart de la communauté, s'il comprend le sens de cette punition.
5
Mais s'il a la tête trop dure, on le punit dans son corps.

24. COMMENT METTRE UN FRÈRE A L'ÉCART DE LA COMMUNAUTÉ

1
La mise à l'écart et la punition dépendent de l'importance de la faute.
2
C'est l'abbé qui juge l'importance des fautes.
3
Quand un frère a fait une faute légère, il ne prend pas son repas avec les autres.
4
Voici comment on traite celui qui est privé des repas en commun : à l'oratoire, il ne dit plus seul les psaumes ou les antiennes, il ne fait plus de lecture, avant d'avoir réparé sa faute.
5
Il mange seul, après le repas des frères.
6
Par exemple, quand les frères mangent à midi, ce frère mange à trois heures de l'après-midi. Quand les frères mangent à trois heures de l'après midi, lui, il mange le soir.
7
Et cela dure jusqu'au moment où il a réparé sa faute comme il faut, et où il obtient son pardon.

25. LES FAUTES GRAVES

1
Le frère qui est coupable d'une faute grave sera privé à la fois du réfectoire et de l'oratoire.
2
Aucun frère n'ira le trouver pour lui tenir compagnie ou lui parler.
3
Il sera seul pour faire le travail qu'on lui a commandé et il restera dans la tristesse que lui cause son repentir. En effet, il connaît la phrase terrible de l'apôtre Paul :
4 « Cet homme-là, on fait mourir son corps pour que son esprit soit sauvé le jour où le Seigneur viendra » (1 Corinthiens 5, 5).
5
Ce frère mangera seul. Pour la quantité de nourriture et l'heure du repas, c'est l'abbé qui jugera ce qui est bon pour lui.
6
En passant près de lui, personne ne le bénira, ni lui, ni la nourriture qu'on lui donne.

26. CEUX QUI, SANS PERMISSION, VONT TROUVER LES FRÈRES MIS A L'ÉCART

1 Quand un moine, sans un ordre de l'abbé, se permet d'aller trouver, d'une façon ou d'une autre, un frère mis à l'écart de la communauté, ou bien de lui parler ou de lui envoyer un message,
2
on le punira en le mettant à l'écart de la communauté, comme l'autre frère.

27. L'ABBÉ DOIT PRENDRE GRAND SOIN DES FRÈRES MIS A L'ÉCART

1
L'abbé prendra un très grand soin des frères qui ont fait des fautes. En effet, « ce ne sont pas ceux qui sont en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais les malades » (Matthieu 9,12).

L'ABBÉ AGIRA COMME UN SAGE MÉDECIN
2 C'est pourquoi l'abbé doit se servir de tous les moyens comme un sage médecin.
Il envoie auprès de ce moine des frères anciens et sages.
3
Comme en secret, ils consolent ce frère peu solide. Ils lui conseillent de réparer sa faute avec un coeur humble. Ils « le consolent pour qu'il ne tombe pas dans une tristesse trop grande » (2 Cor. 2, 7)
4 Et, comme l'apôtre Paul le dit encore : il faut « aimer ce frère davantage » (2 Corinthiens 2, 8), et tous prieront pour lui.

L'ABBÉ AGIRA COMME LE BON BERGER
5 L'abbé doit faire tout ce qu'il faut et très vite, pour ne pas perdre une seule brebis du troupeau que Dieu lui a confié. Pour cela, il se sert de toute son intelligence et de toute son habileté.
6
En effet, il le sait : il a reçu la charge de conduire des personnes malades et non pas de faire peser un pouvoir exagéré sur des personnes en bonne santé.
7 Il aura peur de la menace que Dieu a faite par la bouche du prophète Ézékiel : « Les brebis que vous trouviez grasses, vous les avez prises. Mais les faibles, vous les avez chassées » (Ézékiel 34, 3-4).
8
L'abbé imitera la tendresse du bon berger (Jean 10, 11) qui laisse ses 99 brebis sur les montagnes pour aller chercher
une seule brebis perdue.
9
Il a tellement pitié de la faiblesse de cette brebis qu'il va jusqu'à la mettre sur ses épaules saintes et il la ramène ainsi vers le troupeau (Matthieu 18, 12 ; Luc 15, 4-5).

28. CEUX QUI NE VEULENT PAS CHANGER MALGRÉ DE NOMBREUX REPROCHES

L'ABBÉ AGIRA COMME UN MÉDECIN AVEC CEUX QUI NE SE CORRIGENT PAS
1 Un frère reçoit souvent des reproches pour une faute. Il a même été mis à l'écart de la communauté. S'il ne change pas, on le punira plus durement, c'est-à-dire on le frappera.
2
Malgré cela, il ne se corrige pas. De plus, emporté par l'orgueil - espérons que non ! -, il veut prouver que sa conduite est juste. Dans ce cas, l'abbé agira comme un sage médecin.
3
Il applique d'abord un médicament doux, c'est-à-dire des conseils qui calment la douleur et qui encouragent. Puis il présente au frère la Parole de Dieu pour le guérir. Enfin, il brûle sa plaie en le mettant à l'écart et il lui donne des coups de bâton.
4
Si l'abbé voit que tout ce qu'il fait ne sert à rien, alors il emploie un remède meilleur que les autres.
5
Il va prier et tous les frères vont prier aussi pour ce frère malade, afin que le Seigneur qui peut tout lui rende la santé.

SI LE FRÈRE NE GUÉRIT PAS, L'ABBÉ LE CHASSERA DU MONASTÈRE
6 Pourtant ce frère ne guérit pas, même avec ce remède. Alors l'abbé le coupera de la communauté. Il suivra la parole de l'apôtre Paul : « Enlevez l'homme mauvais du milieu de vous » (1 Corinthiens 5, 13).
7
L'apôtre dit encore : « Quand celui qui n'est pas fidèle veut partir, qu'il parte ! » (1 Corinthiens 7, 15).
8
Sinon, une seule brebis malade va donner la maladie à tout le troupeau.

29. DOIT-ON RECEVOIR DE NOUVEAU LES FRÈRES QUI ONT QUITTÉ LE MONASTÈRE ?

1
Un frère est sorti du monastère par sa faute. Il veut revenir. Alors il promettra d'abord de se corriger tout à fait de la faute qui a causé son départ.
2
Ensuite, on le reçoit au dernier rang. Cela permet de voir si son coeur est vraiment humble.
3
S'il quitte encore le monastère, on le recevra de cette façon jusqu'à trois fois.
Mais, après cela, il saura qu'il ne pourra plus jamais revenir.

30. COMMENT CORRIGER LES JEUNES ENFANTS

1
Il faut traiter chacun selon son âge et selon son jugement.
2
C'est pourquoi voici comment on punira les enfants, les adolescents ou les adultes qui ne peuvent pas comprendre la gravité de la mise à l'écart de la communauté.
3
Quand ils font des fautes, on les fait beaucoup jeûner ou bien on les frappe très fort pour les guérir.

31. LES QUALITÉS QUE LE CELLÉRIER DU MONASTÈRE DOIT AVOIR

1
Comme cellérier du monastère, on choisira dans la communauté un frère sage et de caractère mûr, sobre dans le boire et le manger. Il n'est pas orgueilleux, ni agité, ni injuste, ni lent, ni dépensier,
2
mais animé d'un respect confiant envers Dieu. Pour toute la communauté il sera comme un père.

COMMENT AGIT-IL AVEC SES FRÈRES ?
3 Il prendra soin de tous.
4
Il ne fera rien sans ordre de l'abbé.
5
Il obéira avec soin aux ordres qu'il reçoit.
6
Il ne fera pas de peine à ses frères.
7
Si un frère lui demande quelque chose qui n'est pas raisonnable, le cellérier ne le rendra pas triste en lui montrant du mépris. Mais, humblement, il refusera avec raison à celui qui a fait une mauvaise demande.
8
Le cellérier veillera sur lui-même et il se rappellera toujours cette parole de l'apôtre Paul : « Celui qui fait bien son service se prépare une place d'honneur » (1 Timothée 3, 13).
9 Il prendra le plus grand soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres. Il sera tout à fait sûr qu'au jour du jugement il rendra compte à Dieu de sa façon d'agir avec eux tous.

LE CELLÉRIER RESPECTE LES BIENS DU MONASTÈRE
10 Tous les objets du monastère et tous ses biens, il les regarde comme les vases sacrés de l'autel.
11
Pour le cellérier, rien ne sera sans importance.
12
Il ne sera pas avare. Il ne sera pas non plus dépensier et il ne gaspillera pas les biens du monastère.
Mais il fera tout avec mesure, en suivant les ordres de l'abbé.

IL EST UN SERVITEUR AIMABLE
13 Avant tout, il sera humble. Et quand il ne peut pas satisfaire quelqu'un, il lui répondra aimablement.
14
En effet, la Bible dit : « Une parole aimable vaut mieux que tous les cadeaux » (Siracide 18, 17).
15
Tout ce que l'abbé lui confie, le cellérier s'en chargera avec soin. Ce que l'abbé lui interdit, il ne se permettra pas de s'en occuper.
16 Il servira aux frères la part qui leur revient. Il le fera sans orgueil et sans retard, pour ne pas les faire tomber dans le péché.
Il se rappellera la parole du Christ, et la punition méritée par celui qui « fait tomber dans le péché un seul de ces petits » (Mt 18, 6).

LES AIDES DU CELLÉRIER
17 Quand la communauté est nombreuse, on donnera des aides au cellérier. Alors, avec eux, lui aussi pourra faire le travail qu'on lui a confié en gardant la paix.

PERSONNE NE SERA INQUIET OU TRISTE DANS LA MAISON DE DIEU
18 Au moment qui convient, on donnera ce qu'il faut donner et on demandera ce qu'il faut demander. Alors personne ne sera troublé ou triste dans la maison de Dieu.

32. LES OUTILS ET LES OBJETS DU MONASTÈRE

1
Pour s'occuper des biens du monastère : outils, vêtements et tous les autres objets, l'abbé choisit des frères en qui il a confiance. C'est leur bonne conduite et leur façon de faire qui guident son choix.
2
L'abbé leur donne la responsabilité de ces différents objets, comme il le juge bon.
Alors les frères en prennent soin et ils les rangent.
3 L'abbé aura la liste de ces choses.
Ainsi, quand les frères se succèdent dans un service, l'abbé sait ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.
4
Si quelqu'un traite les objets du monastère sans propreté ou avec négligence, on lui fera des reproches.
5
Si ce frère ne se corrige pas, on le punira selon la Règle.

33. LES MOINES PEUVENT - ILS AVOIR QUELQUE CHOSE A EUX ?

1
Posséder égoïstement est un penchant mauvais. Avant tout, il faut l'arracher du monastère avec ses racines !
2 Personne ne se permettra de donner ou de recevoir quelque chose sans ordre de l'abbé.
3
Et personne n'aura quelque chose à soi, rien, absolument rien : ni livre, ni cahier, ni crayon, rien du tout.
4
En effet, les moines n'ont pas même le droit d'être propriétaires de leur corps et de leur volonté !

L'ABBÉ DONNE AUX MOINES CE QUI EST NÉCESSAIRE
5 Mais tout ce qui est nécessaire, on le demande au père du monastère. Et on n'a pas le droit d'avoir quelque chose, quand l'abbé ne l'a pas donné ou permis.

TOUT EST COMMUN A TOUS
6 « Tout sera commun à tous », comme c'est écrit dans la Bible (Actes 4, 32). Personne ne dira : « Cet objet est à moi », et on n'osera pas le prendre pour soi.
7
Si l'on s'aperçoit qu'un frère cultive avec plaisir ce penchant vraiment mauvais, on l'avertira une fois, deux fois.
8
S'il ne se corrige pas, on le punira.

34. TOUS DOIVENT-ILS RECEVOIR LES CHOSES NÉCESSAIRES DE FAÇON ÉGALE ?

1
On fera comme c'est écrit dans les Actes des Apôtres : « On donnait à chacun selon ses besoins » (Actes 4, 35).
2 Nous ne voulons pas dire qu'il faut faire des différences entre les moines. Surtout pas !
Mais on fera attention à ceux qui sont faibles.
3
Quand un moine a besoin de moins de choses, il remerciera Dieu et il ne sera pas triste.
4 Quand un autre a besoin de plus de choses, il se jugera petit parce qu'il est faible. Il ne se croira pas grand parce qu'on est bienveillant envers lui.
5
Ainsi tous les membres seront dans la paix.
6 Avant tout, les moines ne laisseront jamais apparaître le mal du murmure, sous aucun prétexte, ni en paroles, ni en gestes.
7
Si on voit quelqu'un murmurer, on le punira très sévèrement.

35. LES CUISINIERS DE LA SEMAINE

QUI FAIT LE SERVICE DE LA CUISINE ?
1 Les frères se serviront les uns les autres. Donc personne ne sera dispensé du service de la cuisine, sauf si un frère est malade, ou s'il s'occupe de choses plus importantes.
2
En effet, ce service augmente la récompense et fait grandir l'amour.
3
Ceux qui n'ont pas beaucoup de force, on leur donne des aides pour qu'ils ne travaillent pas avec tristesse.
4
D'ailleurs, tous auront des aides, selon l'importance de la communauté et la situation du monastère.
5
Quand la communauté est nombreuse, le cellérier ne fait pas la cuisine. Ceux qui s'occupent de choses plus importantes ne la font pas non plus, comme on l'a déjà dit.
6
Mais tous les autres frères se serviront mutuellement avec amour.

COMMENT BIEN FAIRE LE SERVICE DE LA CUISINE
7 Celui qui a fini son travail de semaine nettoie tout, le samedi.
8 On lave les linges avec lesquels les frères s'essuient les mains et les pieds.
9
Le cuisinier qui a fini la semaine et le frère qui va la commencer lavent aussi les pieds de tous.
10
Le cuisinier rend au cellérier les ustensiles de son service. Ils seront propres et en bon état.
11
Puis le cellérier les donne au cuisinier qui commence la semaine. Ainsi il sait ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.
12
Quand on ne mange qu'une fois dans la journée, les cuisiniers de la semaine reçoivent chacun avant le repas de la boisson et du pain, en plus de leur part habituelle.
13
Ainsi, au moment du repas, ils peuvent servir leurs frères sans murmurer et sans trop de fatigue.
14
Mais les jours de fête, ils attendront jusqu'aux prières de la fin du repas.

LA PRIÈRE AVANT ET APRÈS LA SEMAINE DE SERVICE
15 Le dimanche, tout de suite après Laudes, les cuisiniers qui vont commencer leur semaine de service et ceux qui l'ont finie se mettent à genoux devant tous, à l'oratoire, et ils demandent aux frères de prier pour eux.
16
Le cuisinier qui a fini la semaine dit ce verset : « Tu es béni, Seigneur mon Dieu, tu m'as aidé et consolé ! » (Psaume 85, 17).
17 Il dit ce verset trois fois et il reçoit une bénédiction. Celui qui commence la semaine vient ensuite et il dit : « Dieu, viens à mon aide. Seigneur, vite à mon secours ! » (Psaume 69, 2).
18
Et tous répètent ce même verset trois fois. Le nouveau cuisinier reçoit une bénédiction, puis il commence la semaine.

36. LES FRÈRES MALADES

SERVIR LES MALADES, C'EST SERVIR LE CHRIST
1 Avant tout et par-dessus tout, il faut prendre soin des frères malades. On les servira vraiment comme le Christ lui-même,
2
parce qu'il a dit : « J'ai été malade, et vous êtes venus me visiter » (Matthieu 25, 36).
3
Et : « Ce que vous avez fait à l'un de ces plus petits, c'est à moi que vous l'avez fait » (Matthieu 25, 40).

LES MALADES NE SERONT PAS EXIGEANTS
4 Mais, à leur tour, les malades comprendront que c'est pour l'honneur de Dieu qu'on les sert. Et ils ne feront pas de peine aux frères qui les servent en réclamant trop de choses.
5
Pourtant, il faut supporter ces malades avec patience, parce qu'ils font gagner une récompense plus grande.
6
L'abbé veillera donc avec très grand soin à ce qu'on s'occupe d'eux sans aucune négligence.

COMMENT SOIGNER LES MALADES
7 Les malades ont un logement à part, exprès pour eux. Pour les servir, on leur donne un frère qui respecte Dieu avec confiance, qui est plein de dévouement et soigneux.
8
Chaque fois que c'est nécessaire, on offre aux malades de prendre un bain. Mais on le permet plus rarement à ceux qui sont en bonne santé et surtout aux jeunes.
9
De plus, on permet aux frères qui sont très faibles de manger de la viande pour refaire leurs forces. Mais, quand ils vont mieux, tous se privent de viande comme d'habitude.

LA RESPONSABILITÉ DE L'ABBÉ
10 L'abbé veillera avec très grand soin à ce que les cellériers et les infirmiers ne soient pas négligents avec les malades. En effet, c'est l'abbé qui est responsable de toutes les fautes de ses disciples.

37. LES VIEILLARDS ET LES ENFANTS

1 L'être humain est naturellement porté à être bienveillant envers les vieillards et les enfants, à cause de leur âge.
Pourtant la Règle, avec son autorité, doit s'en occuper.
2
Il faut toujours tenir compte de leur faiblesse.
Pour la nourriture, on ne les obligera jamais à supporter ce que la Règle a de pénible.
3
Mais, avec eux, on sera plein d'attention affectueuse, et ils pourront manger avant l'heure fixée pour les repas.

38. LE LECTEUR DE SEMAINE

QUI FAIT LA LECTURE PENDANT LE REPAS ?
1 Pendant le repas des frères, la lecture ne doit pas manquer. Et ce n’est pas par hasard qu’un frère prend le livre pour lire au réfectoire. Mais on nomme un frère qui lira pendant une semaine entière. Il commence le dimanche.

LE LECTEUR DEMANDE A ÊTRE PROTÉGÉ DE L’ORGUEIL
2 Après la messe et la communion, le lecteur qui va commencer la semaine demande à tous de prier pour lui, afin que Dieu le protège de l’orgueil.
3
Et à l’oratoire, trois fois de suite, il dira le verset suivant : « Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange »
(Ps 50, 17). Tous le continuent après lui.
4
Et quand il a reçu la bénédiction, le lecteur commence la semaine.

TOUS SE TAISENT POUR ÉCOUTER LA LECTURE
5 Pendant le repas, on garde le silence complet. Ainsi on n’entend personne parler à voix basse ou à voix haute, on entend seulement celui qui lit.
6
Pour la nourriture ou la boisson, les frères se servent les uns les autres. Alors personne n’a besoin de rien demander.
7
Pourtant, si on a besoin de quelque chose, on le demande par un signe plutôt que par la parole.
8
Et pendant le repas, personne ne doit se permettre de poser des questions sur la lecture ou autre chose, et cela,
pour éviter tout désordre.
9
Mais le supérieur peut dire quelques mots, s’il le veut, pour faire du bien aux frères.

LE LECTEUR PEUT BOIRE AVANT DE LIRE
10 Le lecteur de semaine boit du vin mélangé avec de l’eau, avant de commencer la lecture. Il fait ainsi à cause de la sainte communion, et pour que le jeûne ne soit pas trop fatigant.
11
Après la lecture, il prend son repas avec les cuisiniers et avec les frères qui ont servi à table.
12
Tous ne seront pas lecteurs ou chantres selon leur rang. On choisira seulement les frères que l’on peut écouter avec profit.

39. LA NOURRITURE

1 Pour le repas de chaque jour, vers midi ou trois heures de l'après-midi, nous pensons que deux plats cuits suffisent à toutes les tables. Et cela, à cause des faiblesses de chacun.
2
Alors celui qui ne peut pas manger d'un plat mangera de l'autre.
3
C'est pourquoi deux plats cuits suffisent à tous les frères. Et quand on peut avoir des fruits ou des légumes frais, on les ajoute comme troisième plat.
4
Quand il y a un seul repas, et aussi quand il y en a deux, à midi et le soir, un gros morceau de pain suffit pour la journée.
5
Quand on fait un repas le soir, le cellérier garde le tiers du morceau de pain pour le donner aux frères à ce moment-là.
6
Quand il y a plus de travail que d'habitude, l'abbé peut, s'il le juge bon, ajouter quelque chose.
7
Mais il faut surtout éviter les excès, de façon que jamais un moine n'arrive jusqu'à l'indigestion.
8
En effet, il n'y a rien de plus contraire à tout chrétien que de manger trop.
9
Notre Seigneur le dit : « Attention ! Ne rendez pas vos coeurs lourds en mangeant et en buvant trop ! » (Luc 21, 34).
10 Pour les jeunes enfants, on ne sert pas la même quantité de nourriture que pour les plus âgés. On leur en donne moins, en gardant la mesure en toutes choses.
11
Mais tous éviteront absolument de manger de la viande, sauf les malades qui sont très faibles.

40. LA BOISSON

1 « Chacun reçoit de Dieu un don particulier : l'un celui-ci, et l'autre celui-là » (1 Corinthiens 7, 7).
2
C'est pourquoi nous hésitons un peu à fixer la quantité de nourriture et de boisson pour les autres.
3
Pourtant, à cause de l'infirmité de ceux qui sont faibles, nous pensons qu'une hémine de vin suffit à chaque frère pour la journée. 4 Mais, à certains, Dieu donne la force de s'en priver. Ceux-là doivent le savoir, ils recevront pour cela une récompense spéciale.
5 Quand on a besoin de boire davantage de vin à cause de l'endroit où l'on est, à cause du travail ou de la chaleur de l'été, le supérieur décide d'en donner plus. Mais, en tout cas, il fait attention à ceci : les moines ne boiront pas trop de vin et ils ne deviendront jamais ivres.
6
Pourtant, voici ce que nous lisons : « Le vin n'est absolument pas fait pour les moines. » Mais, aujourd'hui, on ne peut pas les convaincre de cette vérité. Alors, mettons-nous d'accord au moins pour dire : il ne faut pas en boire trop, mais avec mesure.
7
En effet, « à cause du vin, même les sages peuvent abandonner Dieu » (Siracide 19, 2).
8
Quelquefois, l'endroit est tellement pauvre qu'on ne peut même pas trouver la quantité de vin fixée plus haut. On en trouve beaucoup moins ou pas du tout. Alors les moines qui vivent là béniront Dieu au lieu de murmurer.
9
Oui, avant tout, voici ce que nous recommandons : que les moines ne murmurent jamais !

41. LES HEURES DES REPAS

1 A partir de la sainte Pâque jusqu'à la Pentecôte, les frères mangent à midi et le soir.
2
A partir de la Pentecôte, pendant tout l'été, quand les moines ne travaillent pas aux champs, et quand ils ne sont pas trop fatigués par la chaleur, ils jeûnent jusque vers trois heures de l'après-midi, le mercredi et le vendredi.
3
Les autres jours, ils mangent à midi.
4
Quand ils travaillent dans les champs ou quand il fait très chaud en été, le repas doit rester fixé à midi. C'est l'abbé qui décide cela. 5 Il règle et organise tout avec mesure. Ainsi les frères peuvent être sauvés et ils font leur travail sans avoir
aucune raison de murmurer.
6
A partir du 14 septembre jusqu'au début du Carême, les frères mangent toujours vers trois heures de l'après-midi.
7
Pendant le Carême jusqu'à Pâques, ils mangent le soir après les Vêpres.
8
Les Vêpres auront lieu assez tôt. Alors on n'aura pas besoin d'allumer une lampe pour le repas,
et tout se terminera à la lumière du jour.
9
C'est la même chose toute l'année : le repas du soir ou le seul repas de la journée sera assez tôt pour que tout
se fasse à la lumière du jour.

42. PERSONNE NE PARLERA APRÈS COMPLIES

1 Les moines doivent s'appliquer à garder le silence tout le temps, mais surtout pendant la nuit.
2
C'est pourquoi, tous les jours, les jours de jeûne et les jours sans jeûne, voici ce qu'on fait.
3
Quand les moines ne jeûnent pas, il y a un repas le soir. Tout de suite après ce repas, tous s'assoient ensemble. Et un frère lit les Conférences ou les Vies des Pères, ou autre chose qu'on peut écouter avec profit.
4
On ne lit pas les sept premiers livres de la Bible ni les Livres des Rois. En effet, pour ceux qui ont l'esprit trop sensible, ce n'est pas bon d'entendre cette partie de la Bible à ce moment-là. Mais on lira ces livres à d'autres heures.
5
Quand c'est un jour de jeûne, on dit les Vêpres. Puis, après un petit moment, les frères viennent sans retard écouter la lecture, comme nous l'avons dit.
6
On lit quatre ou cinq pages, plus ou moins, selon le temps qu'on a. Si quelques moines sont occupés à un travail,
7 cette lecture donne à tous le temps d'arriver à la réunion.
8
Quand tous sont réunis, ils disent Complies. Et, en sortant de Complies, aucun moine n'a plus la permission de dire quelque chose à un autre.
9
Si on trouve un frère qui n'obéit pas à cette règle du silence, on le punit sévèrement.
10
Mais on peut parler exceptionnellement, quand il faut recevoir des hôtes, ou quand l'abbé doit donner un ordre à quelqu'un.
11
Pourtant, même dans ces cas-là, on agira avec un grand sérieux et une grande réserve.

43. CEUX QUI ARRIVENT EN RETARD AU SERVICE DE DIEU OU AUX REPAS

NE RIEN PRÉFÉRER AU SERVICE DE DIEU
1 Quand c'est l'heure du Service de Dieu, dès que les moines entendent le signal, ils laissent immédiatement tout ce qu'ils ont dans les mains et ils arrivent très vite.
2
Mais ils marchent avec sérieux pour éviter d'amuser les autres.
3 Donc on ne doit rien préférer au Service de Dieu.

CEUX QUI ARRIVENT EN RETARD AUX VIGILES
4 On commence les Vigiles par le psaume 94. Il faut le dire lentement, en traînant un peu, à cause des retardataires. Quand un frère arrive après le « Gloire au Père » de ce psaume, il ne se met pas à son rang au choeur.
5
Mais il se tient à la dernière place, ou à l'endroit choisi par l'abbé pour les négligents de cette sorte. A cet endroit, le retardataire est vu par l'abbé et par tous les frères.
6
Il reste là jusqu'à la fin du Service de Dieu. Ensuite il répare sa faute devant tous.
7
Voici pourquoi nous voulons que les retardataires se tiennent à la dernière place, séparés des autres : de cette façon, tous les frères les voient, et alors ils ont honte, et cela les aide à se corriger.
8
En effet, s'ils restent en dehors de l'oratoire, il peut arriver qu'un frère retourne se coucher pour dormir. Ou encore, il peut s'asseoir dehors et passer son temps à bavarder. Ainsi il donne à l'esprit mauvais l'occasion de le faire tomber.
9
Donc il vaut mieux que les retardataires entrent à l'oratoire. Alors ils ne perdent pas tout l'office et, de plus,
ils peuvent se corriger.

CEUX QUI ARRIVENT EN RETARD AUX OFFICES DE LA JOURNÉE
10 Pendant la journée, les frères qui arrivent au Service de Dieu après le verset et après le « Gloire au Père » du premier psaume qui suit le verset, se mettent à la dernière place, comme nous l'avons dit plus haut.
11
Et ils ne se permettent pas de chanter les psaumes avec les frères avant d'avoir réparé leur faute. Mais si l'abbé leur pardonne et leur permet de chanter, ils le font.
12
Pourtant, même dans ce cas, le coupable réparera sa faute

CEUX QUI ARRIVENT EN RETARD AUX REPAS
13 Aux repas, tous les frères ensemble disent le verset et ils prient. Puis ils se mettent à table tous au même moment.
14
Si un frère n'est pas arrivé avant le verset par négligence ou à cause d'un penchant mauvais, on lui fait des reproches,
et cela deux fois.
15
Ensuite, s'il ne se corrige pas, on ne lui permet plus de manger avec les autres.
16 Mais, séparé de la compagnie de tous ses frères, il mange seul et on ne lui donne pas de vin à boire, jusqu'à ce qu'il répare sa faute et se corrige.
17 On punit de la même façon celui qui n'est pas là quand on dit le verset à la fin du repas.

DEUX REMARQUES
Première remarque 18 Aucun frère ne se permettra de manger ou de boire quelque chose avant l'heure du repas ou après.
Deuxième remarque
19
Voici ce qui peut arriver : le supérieur offre quelque chose à un frère, mais celui-ci refuse de le prendre. Ensuite, le frère désire prendre ce qu'il a d'abord refusé ou bien autre chose. Ce frère-là ne recevra rien du tout avant de se corriger comme il faut.

44. COMMENT LES FRÈRES MIS A L'ÉCART RÉPARERONT LEUR FAUTE

1 Le frère qui est mis à l'écart de l'oratoire et du réfectoire, pour une faute grave, se tient prosterné devant la porte de l'oratoire pendant le Service de Dieu.
2
Il reste là, sans rien dire, le visage contre terre, allongé aux pieds de tous ceux qui sortent de l'oratoire.
3
Et cela, il le fait jusqu'au moment où l'abbé juge qu'il a réparé sa faute.
4
Quand l'abbé lui en donne l'ordre, il vient se jeter à ses pieds et aux pieds de tous les frères, afin qu'ils prient pour lui.
5
Et alors, si l'abbé lui en donne l'ordre, on l'accepte au choeur , au rang décidé par l'abbé.
6
Mais il ne se permet pas de réciter seul un psaume, ni de faire une lecture ou autre chose à l'oratoire,
sans un nouvel ordre de l'abbé.
7
Et, à toutes les Heures, à la fin du Service de Dieu, il se jette le visage contre terre, à la place où ils se trouve,
8
et il répare sa faute de cette façon, jusqu'au moment où l'abbé lui donne l'ordre d'arrêter.
9
Les frères qui, pour des fautes légères, sont mis à l'écart du réfectoire seulement, réparent leur faute dans l'oratoire, jusqu'à ce que l'abbé leur ordonne d'arrêter.
10
Ils font cela juqu'au moment où l'abbé donne sa bénédiction et dit : « Cela suffit. »

45. CEUX QUI SE TROMPENT A L'ORATOIRE

1 Si un frère se trompe en récitant un psaume, un répons, une antienne ou une lecture, il fera un geste d'humilité sur place et devant tous, pour réparer sa faute. S'il ne le fait pas, on le punira plus sévèrement.
2
En effet, il n'a pas voulu corriger par un geste d'humilité la faute qu'il a faite par négligence.
3
Quand ce sont des enfants qui refusent de réparer leurs fautes, on les frappera.

46. CEUX QUI FONT D'AUTRES FAUTES

1 Pendant un travail à la cuisine, dans le cellier, dans un service, à la boulangerie, au jardin, dans un atelier
ou dans un autre lieu, un frère fait une faute :
2
il casse ou il perd un objet, ou bien il fait une autre faute, n'importe où.
3
Mais il ne vient pas tout de suite et de lui-même réparer sa faute devant l'abbé et devant la communauté.
Il ne dit pas ce qu'il a fait.
4
Alors, si on apprend la chose par un autre frère, on le punira plus sévèrement.
5
Mais si c'est un péché secret du coeur, il le fera connaître seulement à l'abbé ou à des anciens qui vivent selon l'Esprit de Dieu.
6 Ceux-là savent soigner leurs blessures personnelles et celles des autres, sans les découvrir et sans les raconter à tous.

47. COMMENT ANNONCER L'HEURE DU SERVICE DE DIEU

1 C'est l'abbé qui doit annoncer l'heure du Service de Dieu, le jour et la nuit. Ou bien il donne lui-même le signal, ou bien il en charge un autre frère. Celui-ci fera très attention pour que tout se passe au moment voulu.

COMMENT CHANTER ET LIRE
2 Les frères qui en ont reçu l'ordre récitent seuls les psaumes et les antiennes, chacun à leur tour, après l'abbé.
3 Aucun frère ne se permettra de chanter ou de lire si on ne peut pas l'écouter avec profit.
4
Quand un frère en reçoit l'ordre de l'abbé, il le fait avec humilité, sérieux et grand respect.

48. LE TRAVAIL MANUEL DE TOUS LES JOURS

1 La paresse est l'ennemie de l'âme. Aussi, à certains moments, les frères doivent être occupés à travailler de leurs mains.
A d'autres moments, ils doivent être occupés à la lecture de la Parole de Dieu.
2
C'est pourquoi nous croyons qu'il faut organiser ces deux occupations de la façon suivante :
3 De Pâques au 1er octobre, en sortant de l'office de Prime, les frères font le travail nécessaire jusqu'à 10 heures environ.
4
De 10 heures jusqu'à l'office de Sexte, ils font leur lecture.
5
Après Sexte, en sortant de table, ils se reposent sur leur lit dans un silence complet. Ou bien, quand un frère veut lire en particulier, il lit tout bas, sans gêner les autres.
6
On dit None plus tôt, vers 2 heures et demie. Puis les frères recommencent à travailler jusqu'à Vêpres.
7
Quand ils doivent rentrer les récoltes eux-mêmes, parce que c'est nécessaire là où ils sont, ou bien parce qu'ils sont pauvres, ils ne seront pas tristes.
8
En effet, quand ils vivent du travail de leurs mains, comme nos Pères et les Apôtres, alors ils sont vraiment moines.
9
Pourtant, on fera tout avec mesure, à cause de ceux qui sont faibles.
10
Du 1er octobre jusqu'au début du Carême, le matin, les frères font leur lecture jusqu'à 8 heures environ.
11
Puis, vers 8 heures, ils disent Tierce. Ensuite, ils font le travail qu'on leur a commandé jusqu'à 3 heures de l'après-midi environ.
12 Au premier signal de None, tous les frères laissent leur travail pour être prêts au deuxième signal.
13
Après le repas, ils lisent de nouveau ou ils étudient les psaumes.
14
Pendant le Carême, ils font leur lecture depuis le matin jusqu'à 9 heures. Puis ils font le travail qu'on leur a commandé jusqu'à 4 heures de l'après-midi.
15
Pendant ce temps du Carême, chaque frère reçoit un livre de la bibliothèque. Il le lira à la suite et en entier.
16
On distribue ces livres au début du Carême.
17
Avant tout, on nomme un ou deux anciens qui circulent dans le monastère au moment où les frères font leur lecture.
18
Ils les surveillent : il y en a un peut-être qui n'a de goût à rien. Il passe son temps à ne rien faire ou bavarde au lieu de s'appliquer à la lecture. Ce frère se fait du tort à lui-même et, de plus, il distrait les autres.
19
Quand on trouve un moine de ce genre - espérons que non ! -, on lui fait des reproches une fois, deux fois.
20
S'il ne se corrige pas, on le punit selon la Règle, pour que les autres en éprouvent de la crainte (1 Timothée 5, 20).
21 Un frère n'ira pas avec un autre frère quand ce n'est pas le moment.
22
Le dimanche, tous les frères s'occupent à la lecture, sauf ceux qui sont responsables de services divers.
23
Si un frère négligent ou paresseux ne veut pas ou ne peut pas méditer ou lire, on lui commande un travail pour qu'il ne reste pas sans rien faire.
24
Quant aux frères malades ou de santé fragile, on leur donne une occupation ou un métier qui leur convient. Ainsi, ils ne restent pas inoccupés, et pourtant ils ne sont pas écrasés par un travail trop dur, ou ils n'ont pas envie de le fuir.
25
L'abbé doit tenir compte de leur faiblesse.

49. COMMENT VIVRE PENDANT LE CARÊME

1 Les moines doivent toujours vivre comme pendant le Carême, c'est sûr !
2
Mais peu d'entre eux ont ce courage. C'est pourquoi nous recommandons de garder une vie très pure,
au moins pendant le Carême,
3
et donc d'effacer pendant ces jours saints toutes les négligences du reste de l'année.
4
Pour y arriver, voici ce qu'il faut faire : abandonner tous nos penchants mauvais, faire effort pour prier avec larmes, pour lire, pour avoir le coeur peiné d'avoir offensé Dieu, pour nous priver.
5
Alors, pendant ces jours, ajoutons quelque chose au service habituel qui est notre devoir : prions plus souvent seuls devant Dieu, prenons moins de nourriture et moins de boisson.
6 Ainsi chaque moine offre librement à Dieu et avec la joie de l'Esprit Saint quelque chose en plus de ce qu'on lui demande,
7
c'est-à-dire : il mange moins, il boit moins, il dort moins, il parle moins, il évite les plaisanteries. Et il attend la sainte fête de Pâques avec la joie du désir inspiré par l'Esprit de Dieu.
8
Mais ce que chacun veut offrir à Dieu, il le proposera à son abbé. Ainsi il agira avec son accord et avec l'aide de sa prière.
9
En effet, quand un moine agit sans la permission du père spirituel, il faut penser que cela vient de l'orgueil ou du désir d'être admiré. Et Dieu ne récompense pas cette façon de faire. Donc, il faut tout faire avec l'accord de l'abbé.

50. LES FRÈRES QUI TRAVAILLENT LOIN DE L'ORATOIRE ET CEUX QUI VOYAGENT

1 Certains frères travaillent très loin et ils ne peuvent se rendre à l'oratoire au moment voulu.
2
L'abbé voit que c'est vraiment trop loin.
3
Dans ce cas, ces frères célèbrent le Service de Dieu à l'endroit où ils travaillent, et ils s'agenouillent
avec un grand respect pour Dieu.
4 De la même façon, ceux qu'on envoie en voyage n'oublieront pas de dire les Heures fixées, mais ils les célèbrent seuls, comme ils peuvent. Et ils ne négligent pas d'accomplir ce service qui est pour eux un devoir.

51. LES FRÈRES QUI NE PARTENT PAS TRÈS LOIN

1 Un frère est envoyé pour une affaire en dehors du monastère, et on attend son retour le jour même. Ce frère ne se permettra pas de manger à l'extérieur, même si quelqu'un l'invite en insistant beaucoup.
2
Il peut le faire seulement si l'abbé lui en a donné la permission. 3 Mais s'il agit autrement, on le mettra à l'écart de la communauté.

52. L'ORATOIRE DU MONASTÈRE

1 L'oratoire sera ce que son nom veut dire : un « lieu de prière ». Dans cet endroit, on ne fera pas autre chose que prier, on mettra seulement ce qui est utile pour la prière.
2
Quand le Service de Dieu est fini, tous les frères sortent dans un profond silence, avec un grand respect pour Dieu.
3
Ainsi, quand un frère veut rester pour prier seul, les autres ne le gênent pas.
4
Et quand, à un autre moment, un moine veut prier dans le secret de son coeur, il entre simplement et il prie. Il ne prie pas à voix haute, mais avec larmes et de tout son coeur.
5
Celui qui ne prie pas de cette façon n'aura pas la permission de rester à l'oratoire après le Service de Dieu, comme on vient de le dire. Ainsi, il ne gênera pas un autre frère.

53. L'ACCUEIL DES HÔTES

1 Tous les hôtes qui arrivent seront reçus comme le Christ.
En effet, lui-même dira : « J'étais un hôte et vous m'avez reçu » (Matthieu 25, 35).
2
On les reçoit tous avec le respect dû à chacun, surtout les frères chrétiens et les étrangers (Galates 6, 10).
3
C'est pourquoi, dès qu'on annonce l'arrivée d'un hôte, le supérieur et les frères vont à sa rencontre avec tout l'honneur que l'amour inspire.
4
Ils commencent par prier ensemble. Puis ils se donnent la paix.
5
On donne ce baiser de paix seulement après la prière, à cause des tromperies de l'esprit du mal.
6
Dans les salutations, on montre tous les signes de l'humilité à tous les hôtes qui arrivent ou qui partent.
7
On courbe la tête ou bien on se prosterne à terre pour adorer en eux le Christ qu'on reçoit.
8
Après cet accueil, on conduit les hôtes à la prière. Puis le supérieur ou le frère qu'il envoie s'assoit avec eux.
9
On lit la loi de Dieu devant l'hôte, pour lui faire du bien. Ensuite, on lui donne toutes les marques de l'hospitalité.
10
Le supérieur cesse de jeûner à cause de celui qu'il reçoit, sauf si c'est un grand jour de jeûne qu'il faut à tout prix respecter.
11
Quant aux frères, ils continuent à jeûner comme d'habitude.
12
L'abbé verse de l'eau sur les mains des hôtes.
13
Avec toute la communauté, l'abbé lave les pieds de tous les hôtes.
14
Après le lavement des pieds, on dit ce verset : « Dieu, nous avons reçu ta tendresse dans ta sainte maison » (Ps 47,10).
15
On reçoit les pauvres et les étrangers avec le plus grand soin et la plus grande attention. En effet, c'est surtout à travers eux qu'on reçoit le Christ. Les riches, on les craint, alors on les respecte toujours.

DES FRÈRES SONT CHARGÉS DE LA NOURRITURE ET DU LOGEMENT DES HÔTES
16 La cuisine de l'abbé et des hôtes sera à part. En effet, les hôtes arrivent n'importe quand, et, au monastère, il y en a toujours. Ainsi, ils ne dérangeront pas les frères.
17
Dans cette cuisine, on nomme pour l'année deux frères capables de bien faire ce travail.
18
Quand ils ont besoin d'aides, on leur en donne, pour qu'ils servent sans murmurer. Au contraire, quand ils ont moins d'occupations, ils vont travailler là où on leur commande d'aller.
19
On agit de cette façon non seulement avec eux, mais aussi dans tous les services du monastère.
20
Quand les frères ont besoin d'aides, on leur en donne.
Quand ils n'ont rien à faire, ils obéissent en faisant ce qu'on leur commande.
21
Quant au logement des hôtes, on en charge un frère qui respecte Dieu avec confiance.
22
Là, il y aura des lits garnis, en quantité suffisante. Et ce sont des gens sages qui gouverneront la maison de Dieu avec sagesse.

LES MOINES NE PARLENT PAS AUX HÔTES SANS PERMISSION
23 Aucun frère ne va trouver les hôtes ou parler avec eux, quand il n'en a pas reçu l'ordre.
24
Mais s'il les rencontre ou s'il les voit, il les salue humblement, comme nous l'avons dit, et il demande une bénédiction.
Puis il continue son chemin en disant qu'il n'a pas la permission de parler aux hôtes.

54. EST-CE QU'UN MOINE PEUT RECEVOIR DES LETTRES ET DES CADEAUX ?

1 Sans la permission de l'abbé, un moine ne doit absolument rien recevoir de ses parents, de quelqu'un du dehors ou d'un autre moine : ni lettres, ni objets bénis, ni aucun autre petit cadeau. Il ne doit rien donner non plus.
2
Si ses parents lui envoient quelque chose, il ne prend pas la liberté de l'accepter avant d'en parler à l'abbé.
3
Et si l'abbé permet d'accepter ce cadeau, c'est encore à lui, l'abbé, de donner l'objet à qui il veut.
4
Et le frère à qui on l'a envoyé ne sera pas triste à cause de cela.
Ainsi, il ne donne pas à l'esprit mauvais l'occasion de le faire tomber.
5
Si un moine prend la liberté de faire autrement, on le punira selon la Règle.

55. LES VÊTEMENTS ET LES CHAUSSURES DES FRÈRES

1 Les vêtements qu'on donne aux frères sont différents selon l'endroit où ils habitent et selon le climat.
2
En effet, dans les régions froides, il faut plus de vêtements ; dans les régions chaudes, il en faut moins.
3
C'est l'abbé qui jugera de cela.
4 Pourtant, nous croyons que dans les régions tempérées une coule et une tunique suffisent pour chaque moine,
5
avec un scapulaire pour le travail. Pendant l'hiver, la coule est en tissu épais. Pendant l'été, c'est une coule légère ou usée.
6
Pour se couvrir les pieds, les moines ont des chaussettes et des chaussures.
7
Ils ne doivent pas se plaindre de la couleur et de l'épaisseur de ces vêtements. Mais ils prennent ce qu'on peut trouver dans le pays où ils vivent, ou ce qu'on peut acheter de moins cher.
8
L'abbé fait attention à la mesure des habits. Ils ne seront pas trop courts, mais à la taille de chacun.
9
Quand les frères reçoivent des vêtements neufs, ils rendent toujours aussitôt leurs vieux habits.
On les garde au vestiaire pour les pauvres.
10
En effet, pour un moine, deux tuniques et deux coules suffisent pour en changer la nuit et pour les laver.
11
Les vêtements en plus sont inutiles et il faut les supprimer.
12
Les frères rendent aussi les chaussettes et tout ce qui est usé, quand ils reçoivent des affaires neuves.
13
Les frères qu'on envoie en voyage reçoivent des caleçons qu'on prend au vestiaire. A leur retour, ils les lavent et ils les rendent. 14 Pour ceux qui voyagent, les coules et les tuniques sont un peu meilleures que celles qu'ils ont d'habitude. Ils les reçoivent du vestiaire quand ils partent et ils les rendent au retour.
15
Pour le lit, une paillasse, un drap épais, une couverture de laine et un oreiller suffisent.
16
L'abbé doit inspecter souvent ces lits pour voir s'il n'y a pas un objet qu'un frère a pris pour lui.
17
Si on trouve chez un frère un objet qu'il n'a pas reçu de l'abbé, on le punira très sévèrement.
18
Pour arracher jusqu'à la racine cette, tendance mauvaise à posséder égoïstement, l'abbé donnera tout ce qu'il faut,
19
c'est-à-dire : coule, tonique, chaussettes, chaussures, ceinture, couteau, crayon, aiguille, mouchoirs, cahiers. Alors les frères n'ont pas l'excuse de manquer de quelque chose.
20
Pourtant l'abbé fait toujours attention à cette parole des Actes des Apôtres: « On donnait à chacun selon ses besoins »
(Ac 4, 35).
2l
C'est pourquoi il tient compte des infirmités des faibles. Mais il ne tient pas compte de la mauvaise volonté de
ceux qui sont jaloux.
22
Et, dans toutes ses décisions, l'abbé pensera qu'il devra rendre des comptes à Dieu.

56. LES REPAS DE L'ABBÉ

1 L'abbé prend tous ses repas avec les hôtes et les étrangers.
2
Mais quand il y a moins d'hôtes, il peut inviter à sa table les frères qu'il veut.
3
Pourtant, il laissera toujours un ou deux anciens avec les frères pour maintenir le bon ordre.

57. LES ARTISANS DU MONASTÈRE

1 Quand il y a des artisans au monastère, ils feront leur métier avec beaucoup d'humilité, et si l'abbé le leur permet.
2
Mais il peut arriver ceci : un frère artisan se croit grand parce qu'il fait bien son métier.
Il pense qu'il rapporte quelque chose au monastère.
3
Alors on lui enlèvera ce travail. Et il ne s'en occupe plus, sauf s'il devient humble et si, à cause de cela, l'abbé lui donne l'ordre de reprendre son métier.
4
Quand on vend un objet fabriqué par les artisans, cet objet passe par les mains de plusieurs personnes.
Elles feront attention à ne se permettre aucune malhonnêteté,
5 elles se rappelleront toujours l'histoire d'Ananie et de Saphire (Actes 5,1- 11). Ceux-là, ils ont subi la mort dans leur corps.
6 Mais ces personnes et tous ceux qui sont malhonnêtes avec les biens du monastère auront peur de souffrir
la mort dans leur coeur.
7
Pour fixer les prix, on ne se laissera pas gagner par la passion de l'avarice.
8
On vendra les objets toujours un peu moins cher que les autres artisans,
9
« pour qu'en tout on rende gloire à Dieu » (1 Pierre 4, 11).